Les chercheurs de l'UZ Brussel réalisent des avancées dans le traitement ciblé du mélanome, un cancer de la peau
16 février 2024Les résultats de recherches récentes offrent des perspectives aux patients atteints de mélanome, l'une des formes les plus agressives de cancer de la peau. La thérapie ciblée est une forme importante de traitement pour les patients souffrant d'une certaine variante génétique (BRAF V600) du mélanome. Des recherches récentes menées par l'équipe du Pr Bart Neyns, chef du service d'Oncologie médicale de l'UZ Brussel, montrent que cette thérapie ciblée peut également fonctionner chez des patients présentant une autre mutation génétique dans les cellules de mélanome. En outre, les patients n'ont plus eu d’éruption cutanée désagréable, un effet secondaire majeur du traitement existant. En plus, l'équipe a pu trouver une solution pour un mélanome BRAF V600 résistant en ajoutant un médicament anticancéreux connu. Ainsi, des patients pour lesquels aucun traitement n'était possible auparavant ont pu être aidés. Les résultats de ces recherches ont été publiés dans la revue Journal of Clinical Oncology - Precision Oncology et présentés lors du récent congrès de l’ESMO, la Société européenne d'Oncologie médicale, à Madrid.
Le mélanome, la maladie tumorale maligne des cellules pigmentaires de l'organisme, est de plus en plus fréquent. Lorsque cette forme de cancer de la peau se propage dans l'organisme, elle est mortelle à court terme en l'absence de traitement. La dernière décennie a vu des avancées significatives dans le traitement du mélanome avec l'avènement de l'immunothérapie active et des thérapies dites "ciblées". Cette forme de traitement est principalement utilisée lorsque des altérations moléculaires et génétiques sont détectées dans les cellules de mélanome. Pour les patients présentant une mutation BRAF V600 (environ 40 % de l'ensemble des mélanomes), il est prouvé que ce traitement ciblé permet de prolonger la durée de vie. Trois traitements combinés avec un inhibiteur de BRAF et de MEK sont actuellement disponibles en Belgique.
Un traitement ciblé également actif chez des patients porteurs d’une autre mutation de cellules de mélanome
La première étude réalisée par l'équipe du Pr Bart Neyns, chef du service d'Oncologie médicale de l'UZ Brussel, a montré que le traitement ciblé entraîne une diminution de la taille des métastases chez les patients qui ne présentaient pas la mutation BRAF V600 ‘classique’. Ils présentaient une mutation différente du gène BRAF ou d'autres gènes connus pour activer de manière similaire la cascade de signalisation MAPK. Cette cascade forme des voies de signalisation importantes dans l'organisme qui régulent divers processus tels que la croissance, le changement, la mort cellulaire et la réponse au stress.
En outre, le nouveau dosage de ce médicament a permis aux patients de ne plus souffrir d'éruptions cutanées très gênantes comme effet secondaire du traitement.
« Cela représente une grande valeur ajoutée », témoigne le Dr Gil Awada, premier auteur de la publication. « Même si ces réactions cutanées mettent rarement la vie en danger, elles sont très ennuyeuses parce qu’elles stigmatisent nos patients en provoquant une éruption cutanée proéminente avec des boutons sur le visage. De plus, elles surviennent chez presque tous les patients qui ne suivent pas notre nouvelle méthode de traitement, ce qui conduit très souvent à l'interruption ou à l'arrêt du traitement ».
Les résultats de leur essai clinique ont été publiés dans la revue Journal of Clinical Oncology - Precision Oncology (REF), qui fait autorité en la matière. Ils sont également immédiatement applicables aux patients atteints de mélanome présentant des caractéristiques moléculaires et génétiques prédictives. Cela signifie que l'analyse des caractéristiques moléculaires et génétiques révèle des anomalies spécifiques qui permettent de prédire les chances de réussite du traitement.
Une solution pour le mélanome devenu résistant aux inhibiteurs disponibles
Dans un deuxième essai clinique, l'équipe du Pr Neyns a pu constater que l'ajout d'un médicament anticancéreux connu, le régorafénib, peut permettre à un mélanome mutant BRAF V600 de répondre à nouveau lorsqu'il est devenu résistant aux inhibiteurs BRAF/MEK disponibles.
Lors de la dernière réunion de la Société européenne d'Oncologie médicale à Madrid, le Dr Iris Dirven a présenté les résultats obtenus chez des patients atteints de mélanome avec des métastases cérébrales qui ne répondaient plus à leur traitement.
« Lorsque le mélanome métastase au cerveau et ne répond plus aux inhibiteurs de BRAF/MEK, nous savons qu'il n'y a pas de traitement médical utile qui puisse encore enrayer la maladie et que l'espérance de vie est, comme on peut s'y attendre, très courte », explique le Dr Iris Dirven à propos de sa recherche. « Le fait que nous ayons pu documenter pour la première fois que l'ajout d'un troisième médicament, le régorafénib, peut renouveler l'effet de la thérapie ciblée chez certains de ces patients dépasse nos espérances ».
Egalement une solution possible pour des patients chez qui tous les traitements visant à prolonger la durée de vie n’ont pas échoué
Le Pr Neyns et le Dr Dirven poursuivent à présent leurs recherches sur des patients moins lourdement prétraités. Les premiers résultats de ces recherches ont été présentés lors de la réunion MelanomaBridge à Naples. « Ce que nous avons vu jusqu'à présent, c'est que le médicament stivarga seul a également une certaine activité chez les patients atteints de mélanome et qu'associé à des inhibiteurs de BRAF/MEK, il peut offrir une meilleure efficacité chez les patients présentant la mutation BRAF V600 ».
L'essai clinique se poursuit donc spécifiquement pour ce groupe de patients atteints de mélanome avec la mutation BRAF, dont l'évolution est péjorative après le traitement standard disponible. En outre, l'étude a pu montrer que le regorafenib est particulièrement efficace dans les mélanomes présentant une mutation KIT, une forme rare d'altération moléculaire dans le mélanome. « Les cinq patients que nous avons traités jusqu'à présent ont tous réagi », témoigne avec enthousiasme le Dr Iris Dirven.
En collaboration avec le fabricant du stivarga (Bayer), le groupe de recherche tente à présent de mettre en place une étude internationale pour cette forme rare de mélanome avec mutation KIT.